Contrôler son asthme en s'amusant : l'innovation ludocare
- Charlotte Combet

- 30 sept.
- 4 min de lecture
L’asthme est la première maladie chronique de l’enfant et l’une des principales causes d’absentéisme scolaire, en grande partie lié à une observance insuffisante des traitements de fond. Comment accompagner les jeunes patients pour mieux vivre avec cette pathologie?
Ludocare, entreprise lyonnaise spécialisée en santé numérique, innove avec un compagnon connecté qui rend l’apprentissage thérapeutique ludique et efficace. Son ambition : ancrer les bons réflexes dès l’enfance et transformer durablement la prise en charge de l’asthme, en France comme à l’international.
Informations Entreprise : Quels sont aujourd’hui, selon vous, les principaux obstacles à l’adoption des thérapies digitales en France et à l’international ?
Alexandra De La Fontaine (Cofondatrice & CEO de Ludocare) : L’un des principaux freins à l’adoption des thérapies digitales réside dans l’absence de modèles économiques adaptés aux réalités culturelles et réglementaires de chaque pays. En France, pour qu’une thérapie numérique soit véritablement intégrée dans le parcours de soins, elle doit être reconnue par les autorités comme un traitement à part entière - au même titre qu’un médicament - ce qui implique prescription et remboursement.
Malgré des avancées récentes, comme la mise en place de nouveaux dispositifs d’accès au marché, aucune thérapie digitale n’est à ce jour remboursée en France, alors même qu’elles pourraient réduire les complications et les hospitalisations, et donc les coûts de santé. Ce contraste est saisissant avec l’Allemagne, où 59 thérapies digitales bénéficient déjà d’un remboursement. Avant même d’aborder la question de l’adoption par les professionnels de santé, il est crucial de structurer un cadre d’accès au marché efficace pour enclencher une dynamique durable. À l’heure où la souveraineté sanitaire est un enjeu majeur, les entreprises françaises ont un rôle clé à jouer et disposent de nombreux atouts pour y parvenir.
Pourquoi avez-vous choisi de concentrer vos efforts sur la population pédiatrique dans la gestion de l’asthme ?
Le manque de contrôle de l’asthme est un problème structurel. Trois facteurs compromettent l’efficacité des traitements : une observance insuffisante, une mauvaise utilisation des dispositifs et une technique d’inhalation inadaptée. Lorsqu’un traitement est mal pris, son efficacité chute et entraîne souvent des ajustements thérapeutiques inutiles. À cela s’ajoutent des erreurs de manipulation qui empêchent le médicament d’atteindre les bronches, réduisant fortement son effet.
Ces difficultés sont avant tout liées à un manque d’apprentissage : il s’agit d’une question d’éducation thérapeutique. Nous avons donc choisi de concentrer nos efforts sur la pédiatrie, car l’enfance est l’âge des apprentissages. Prendre correctement un traitement n’est pas intuitif : cela s’apprend, comme lire ou se brosser les dents. En accompagnant les enfants dès le plus jeune âge, nous ancrons des habitudes durables, protégeons leur système respiratoire et améliorons leur santé à long terme. Cette approche de prévention tertiaire a un impact direct sur la qualité de vie des patients et, plus largement, sur les dépenses de santé publique.

Avec la Thérapie Digitale JOE, vous proposez une solution hybride associant apprentissage ludique et efficacité clinique
Dès la création de Ludocare en 2017, nous avons voulu répondre à un enjeu universel : la difficulté, pour les enfants comme pour leurs parents, de bien utiliser les traitements contre l’asthme. Notre solution est hybride : une application pour les parents et un robot compagnon connecté pour l’enfant.
Ce robot, co-conçu avec des enfants, a été pensé comme un allié positif et non comme un rappel contraignant de la maladie. Il transforme la prise de traitement en une expérience ludique et rassurante grâce à des vidéos pédagogiques animées et des consignes vocales guidant pas à pas l’enfant dans la bonne utilisation de son dispositif.
Cette approche favorise l’autonomie, réduit les tensions familiales et améliore concrètement l’observance et la technique d’inhalation, dans un cadre bienveillant, structuré et automatisé.

Comment votre solution est-elle reconnue médicalement et quelles sont vos ambitions en termes d’accès et de remboursement ?
Notre solution a été conçue dès le départ comme un dispositif médical à finalité thérapeutique, doté du marquage CE, et prescrit en complément du traitement de fond chez l’enfant asthmatique. Elle s’intègre dans le parcours de soins sur indication médicale.
Pour démontrer son efficacité, nous avons mené une étude clinique répondant aux standards européens (EMEA), incluant 213 enfants dans 17 centres hospitaliers et libéraux en France. La taille de l’échantillon est particulièrement significative pour cette population, renforçant la robustesse scientifique de nos résultats.
Notre ambition est claire : obtenir un remboursement afin de rendre cette innovation accessible à tous les enfants concernés, en France comme à l’international.
Nous portons une innovation à fort impact sociétal, capable de transformer durablement la prise en charge de l’asthme pédiatrique.
Envisagez-vous d’élargir votre solution à d’autres pathologies que l’asthme pédiatrique ?
Notre solution repose sur un socle logiciel et des algorithmes pouvant être adaptés à d’autres aires thérapeutiques. Toutefois, nous faisons le choix stratégique de nous concentrer sur l’asthme pédiatrique, qui touche 12 % des enfants dans le monde, entraîne 42 000 hospitalisations par an en France et représente la première cause d’absentéisme scolaire.
C’est une pathologie sous-estimée qui, lorsqu’elle est mal contrôlée, entraîne un cercle vicieux : exacerbations fréquentes, remodelage bronchique, complications à l’âge adulte. Les conséquences sont multiples : retards scolaires des enfants, impact sur les trajectoires professionnelles de leurs parents et coûts élevés pour les systèmes de santé.
Notre priorité est donc de déployer internationalement notre solution en capitalisant sur les preuves cliniques obtenues en France.
Quel futur imaginez-vous pour la prise en charge de l’asthme pédiatrique à l’horizon de dix ans ?
Dans dix ans, nous espérons que des Dispositifs Médicaux Numériques comme JOE seront prises en charge par l’assurance maladie et auront contribué à réduire significativement les complications liées à l’asthme, allégeant ainsi le poids de cette maladie pour les familles et pour les finances publiques.
Chaque enfant diagnostiqué pourra ainsi bénéficier d’un accompagnement global associant traitement de fond et solution digitale personnalisée. Grâce au numérique et à l’intelligence artificielle, l’enfant - puis l’adulte - pourra anticiper les risques, recevoir des alertes en cas de pic de pollution ou d’exposition à des allergènes, et être averti d’un oubli de traitement.
Nous passerons d’une logique de prévention à une logique prédictive, avec des outils intelligents capables de croiser données environnementales, comportementales et médicales.
Chez LUDOCARE, nous sommes fiers d’incarner une France qui soigne, innove et investit dans l’avenir : celui d’un système de santé préventif, efficient et souverain.



