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Poéthique urbaine et intérieure

La réhabilitation des bâtiments existants s’impose comme une nécessité au sein d’un marché immobilier de plus en plus contraint. Comment répondre aux défis économiques et écologiques de cette transformation ? DTACC Architectes, acteur majeur de la réhabilitation à Paris, illustre par son expertise et son approche innovante comment préserver et valoriser le patrimoine bâti.


Informations Entreprise : Comment évaluez-vous l’importance de la réhabilitation des bâtiments existants dans le marché immobilier actuel ?


Christian Sbeih (Architecte Associé chez DTACC) : La réhabilitation est aujourd’hui une des solutions majeures permettant de réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction. Bien que coûteuse, parfois plus qu’une construction neuve, la réhabilitation permet de préserver les ressources existantes et d’éviter l’artificialisation de nouveaux sols.


Dans la démarche de développement durable de nos projets, nous visons à préserver plus de 80% de la structure et à favoriser le réemploi. Le mot « durable » est issu du mot

« durée ». Un bâtiment qui dure dans le temps amortit son bilan carbone. Nous avons déjà réhabilité plusieurs fois les mêmes bâtiments, augmentant ainsi leur durée de vie de 30 à 40 ans à chaque intervention. La rareté des terrains et la nécessité de préserver les ressources naturelles imposent de densifier les villes, de les reconstruire sur elles-mêmes, en adaptant les structures existantes.


D’un autre côté, la réhabilitation prend tout son sens dans un contexte immobilier à forte valeur patrimoniale et architecturale, ou économiquement tendu comme celui de Paris. Dans une ville où la valeur du mètre carré est élevée, la réhabilitation est la seule solution viable. À Paris, la réhabilitation est incontournable pour plusieurs raisons : nous sommes dans un site historique où la démolition totale est rarement, voire jamais envisageable. De plus, la plupart des bâtiments existants est hors gabarit, ce qui signifie qu’une démolition-reconstruction entraînerait une perte de surface constructible et de valeur.


En revanche, dans d’autres villes, les coûts élevés de la réhabilitation ne sont pas toujours compensés par des loyers suffisants pour garantir un retour sur investissement. Dans ce cas, la réhabilitation devient encore plus un acte engagé en faveur de la préservation de notre environnement bâti.


I.E : Comment votre démarche s’adapte-t-elle aux défis économiques actuels ?


Christian Sbeih : DTACC se consacre presque exclusivement à la réhabilitation depuis l’ arrivée de la 2ème génération d’associés. Dès la fin des années 80 et le début des années 90, l’agence a concentré ses efforts sur la valorisation et la réhabilitation du bâti existant, ce qui représente aujourd’hui plus de 90 % de notre activité. Cette orientation était à la fois une conviction et une réponse pragmatique aux contraintes de construction à Paris.


Lorsqu’un bâtiment existant est vacant, il engendre automatiquement des pertes, obligeant les propriétaires à le relouer rapidement. Aujourd’hui, face à la hausse des taux d’intérêt, nos clients rencontrent plus de difficultés à financer leurs projets. Cela entraîne des projets de réhabilitation plus modestes mais alignés avec notre philosophie de maximiser l’utilisation de la structure existante et d’investir judicieusement le budget de nos clients dans des améliorations concrètes des conditions d’usage et de vie des bâtiments réhabilités.


I.E : Quels sont les principaux défis que vous rencontrez dans la réhabilitation des bâtiments existants et comment les surmontez-vous ?


Christian Sbeih : Il n’existe pas de solution toute faite. La réhabilitation est une science du prototype. Notre démarche consiste à effectuer une analyse extrêmement fine de l’existant. Nous analysons les points forts et les points faibles du bâtiment, nous corrigeons les faiblesses et amplifions les atouts. Bien que cela paraisse simple, cela nécessite une grande minutie, des connaissances accrues des différentes époques constructives, une sensibilité aux questions patrimoniales et un respect du travail des concepteurs et constructeurs initiaux des bâtiments.

La réhabilitation d’un bâtiment haussmannien diffère de celle d’un édifice du 20e ou 21e siècle, mais la démarche reste la même. Chaque projet est unique et demande une compréhension méthodique de l’existant avant toute intervention. Nous ne suivons pas de dogme ou de posture prédéfinie. Nous utilisons les règles d’urbanisme, de sécurité incendie et d’accessibilité comme des outils au service du projet, et non comme de pures contraintes. Cette approche nous permet de trouver de la valeur là où d’autres ne la voient pas, en poussant l’exercice jusqu’à en extraire la quintessence. Cette rigueur et cet acharnement font que nos bâtiments sont souvent plus beaux que les dessins initiaux et intuitifs dans leur usage.


I.E : Pouvez-vous nous donner un exemple concret d’un projet de réhabilitation réalisé par DTACC ?


Christian Sbeih : D’un point de vue écologique, préserver un bâtiment existant plutôt que de le démolir est déjà une victoire. Tous nos projets, qu’ils soient à Paris ou ailleurs, intègrent des critères environnementaux stricts et sont souvent triplement ou quadruplements certifiés, bien que nous privilégiions le bon sens aux simples labels.


Un exemple concret de notre approche est la réhabilitation récente d’un ensemble architectural Haussmannien de 10 000m², rue Pierre Charron, au cœur du 8ème arrondissement de Paris. Nous avons évidemment choisi de conserver au maximum la structure existante, de mettre en valeur l’architecture d’origine, d’harmoniser le couronnement et travailler sur les verticalités, tout en préservant les escaliers historiques. Nous avons intégré des matériaux biosourcés et géosourcés, avec une extension construite en ossature bois. Ces choix, au-delà de leurs vertus environnementales, complètent le bâtiment et améliorent le cadre de vie des usagers et des riverains. Un autre exemple est celui de notre projet 61 Galilée 21 Vernet, qui porte sur la réhabilitation et réunion de 2 bâtiments d’époques différentes : haussmannien et années 1970. Nous croyons que l’innovation doit avant tout signifier progrès et qualité de vie, plutôt que performance environnementale pure.


I.E : Comment percevez-vous l’évolution de votre marché dans les années à venir ?


Christian Sbeih : La réhabilitation est en pleine expansion, tant dans le secteur public que privé. Chez DTACC, nous avons longtemps oeuvré dans le privé, mais aujourd’hui, tous les acteurs de la construction prennent conscience de l’importance de la réhabilitation. Nous sommes désormais régulièrement retenus dans des concours publics en tant que spécialistes de cette discipline.


La création de valeur ne se limite plus à l’aspect financier. Il y a une véritable prise de conscience de l’importance de la valeur sociale et environnementale. Aucun projet n’est développé sans que ces trois aspects ne soient pris en compte. Jusqu’à récemment, l’objectif était de maximiser ou augmenter les mètres carrés. Désormais, nos clients comprennent que pour une architecture durable et réussie, il faut plus que des chiffres : il faut une part de poésie qui donne envie de préserver le bâtiment, en créant des lieux où les gens abritent leurs rêves et leurs succès.


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